animal sujet publie les traductions d’articles animalistes : militantisme, résistance et agentivité animales, cohabitation humains-animaux...

Analyse stratégique des réformes pour le bien-être animal ... (3)


 
1. Les animaux (4) existent

Les animaux déjà existants vivent dans le monde matériel et éprouvent des . plaisirs et des souffrances réels selon ce qui leur arrive. Les actions ou l’absence d’actions des militants animalistes(5) contribuent à déterminer ce qui arrive aux animaux déjà existants. Ainsi, ce que nous faisons (ou ne faisons pas) comptent pour eux. Nous devons partir du principe que ce qui leur arrive concrètement comptent plus pour les animaux que nos théories, nos motivations ou nos buts. Aussi les actions entreprises en faveur des animaux devraient-elles être dictées par une appréciation minutieuse de ce qui risque de leur arriver plutôt que par nos inclinations, nos théories ou nos habitudes.

2. Rien n’arrive ex-nihilo

En fait, rien n’arrive si ce n’est dans un contexte particulier. Par conséquent, les actions proposées en faveur des animaux devraient être analysées individuellement et dans leurs contextes concrets, plutôt que jugés dans l’abstrait ; au lieu d’approuver ou de condamner les "actions directes" ou les "réformes welfaristes" nous devrions nous demander quels pourraient être les résultats de telle action directe ou de telle réforme welfariste, à un endroit et à un moment particuliers. Les analyses, dans leurs contextes, des tactiques proposées peuvent, en plus de fournir une meilleure méthode d’évaluation, révéler des conséquences et des perspectives à côté desquelles on aurait pu passer.

3. Les animaux sont les sujets de la libération animale

Tous les jours, et d’une multitude de façons, les animaux résistent non seulement à la captivité et à l’assujettissement mais aussi à l’intrusion des hommes dans leur habitat. Aussi les animaux devraient-ils être reconnus comme sujets, plutôt que comme objets, de la libération animale. Afin d’éviter de reproduire la dynamique de l’oppression animale dans laquelle les animaux sont vus comme des objets soumis à l‘arbitraire humain, les militants animalistes doivent apprendre à se voir comme les alliés des animaux qui cherchent à obtenir leur propre libération, et à leur accorder la même considération qu’aux humains qui cherchent à obtenir leur libération. De même que les hétérosexuels laissent aux homosexuels le droit de déterminer quelle direction doit prendre le mouvement de libération homosexuelle, les militants animalistes doivent regarder les animaux comme les leaders légitimes du mouvement de libération animale.

4. La libération comprend l’autodétermination et la liberté

La libération signifie non seulement ne plus être captif, ni soumis au travaux forcés et autres choses de ce genre, mais aussi être libre de décider de son propre destin, autant qu’il est possible de le faire à l’intérieur des contraintes naturelles imposées par le monde matériel et la vie sociale. Pour les gens, l'autodétermination signifie faire ses propres choix en ce qui concerne le domaine personnel comme les soins médicaux, et avoir une voie égale dans les décisions collectives concernant les questions sociales telles que la gouvernance. Les vrais alliés des personnes asservies, ou subissant un autre type d’oppression, respectent leur droit à l’autodétermination, en s’efforçant de les aider à obtenir ce qu’elles veulent et non en leur imposant d’autres objectifs. Donc, si une communauté de réfugiés ayant fui les persécutions raciales dit que ce dont elle a le plus besoin est une maternité, ce n’est pas à ses alliés d’insister pour que les ressources limités dont elle dispose soient utilisées pour construire une école élémentaire. De la même façon, les alliés des animaux devraient respecter leurs droits à l’autodétermination en ce qui concerne, entre autre, la question de savoir s’ils doivent endurer des souffrances extrêmes qui pourraient être soulagées.

5. Les animaux peuvent vouloir plus que la seule libération

Nous avons tendance à penser à la libération comme à l’une des choses que les gens désirent le plus pour eux-mêmes comme, par exemple, la reconnaissance juridique de leurs droits. Les animaux non-humains en tant que classe (ou des sous-groupes d’animaux non-humains) veulent peut-être plus - ou bien autre chose, que les animaux humains. Par exemple, alors que le concept de "justice environnementale" est relativement nouveau et peu répandu, beaucoup d’animaux sont plus perturbés par la pollution et le tarissement des cours d’eau causés par les humains que par leur manque de droits à l’intérieur de notre système législatif. Si jamais ils sont perturbés par notre système législatif, c’est par l’existence même de lois soutenues par les armes qui réduisent le monde naturel à des ressources exploitables par des groupes de personnes. Ainsi les poissons sauvages qui jouissent de la liberté de mouvement dans des eaux illimitées mais empoisonnées ont des demandes qui vont au-delà de la libération telle qu’elle est généralement comprise. De la même façon, les oiseaux libres menacés d’inanition à cause du changement climatique ont des demandes légitimes qui, bien qu’aussi urgentes, sont différentes de celles des oiseaux enfermés dans des cages et menacés d’inanition à cause des mues forcées.

6. Les animaux ont une voix

Bien que beaucoup de militants animalistes aiment à se désigner comme "la voix des sans voix", il n’en demeure pas moins que les animaux peuvent exprimer leurs désirs tout à fait clairement et qu’ils le font souvent. Les animaux crient dans la détresse, grondent pour se défendre et fuient la captivité. Les animaux roucoulent de contentement, se détendent lorsqu’ils se sentent en sécurité, et vont vers les choses qu’ils désirent. Qu’ils soient exprimés vocalement ou par le comportement, les souhaits des animaux peuvent être généralement compris grâce à une observation superficielle. Des indications plus subtiles peuvent être interprétées avec précision par ceux qui ont une connaissance approfondie des animaux en question.




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(4) Les humains sont des animaux. Ainsi que je l’ai dit ailleurs, la pleine reconnaissance de ce fait nécessite des changements dans notre façon de penser à la "libération animale". Toutefois, afin d’éviter des excès de verbiage, j’utilise ici  "animaux" pour parler des animaux non humains, sauf indication contraire.
(5) A des fins de concision, j’utilise le terme "militants animalistes" pour y inclure tous les militants pour les droits des animaux ou la libération animale, que leurs tactiques comprennent un travail de "défense des droits" proprement dit, ou non.